Pourquoi et comment maîtriser le turnover en entreprise ?

Parmi les indicateurs à surveiller lorsqu’on est à la tête d’une entreprise, ceux qui touchent au personnel sont les plus stratégiques. La qualité et l’engagement des salariés sont un atout clé dans la réussite et le développement d’une société. Le taux de turnover en entreprise doit ainsi être scruté en permanence.

Qu’est-ce que le turnover en entreprise ?

Turnover, encore un terme anglais appliqué à la gestion d’une société ! Mais que recouvre effectivement cette notion de « rotation » ?

Le turnover, un indicateur indispensable de la gestion des ressources humaines

Il s’agit du taux de renouvellement des effectifs sur une période donnée. En soi, rien de révolutionnaire. Il est naturel que dans quelque structure que ce soit, il y ait des mouvements : certains salariés la quittent pour de nombreuses raisons, d’autres y entrent.

Ce phénomène a tout simplement trait à la vie. On n’imagine pas un pays, une société sans mouvements ; les gens naissent, meurent, émigrent… L’entreprise est un pays miniature et la politique RH doit le prendre en compte. Cet indicateur en dit beaucoup sur son état de santé : climat social, engagement des salariés, stabilité économique de la structure, il en est un reflet fidèle.

Le calcul du turnover en entreprise

Il est calculé sur une période annuelle, généralement l’année civile.

On fait le compte de tous les départs, licenciements, ruptures conventionnelles, démissions, départs à la retraite…, et de toutes les embauches. C’est le rapport de ce flux sur le nombre total de salariés de l’entreprise qui permet de calculer le turnover.

La formule de calcul est la suivante :

([Nombre de départs + nombre d’embauches]/2)/nombre de salariés au début de l’année de référence) X 100.

Elle permet d’obtenir un taux de 0% (ni départ ni embauche) à 100% (renouvellement total de l’effectif).

Prenons un exemple : une entreprise compte 1000 salariés au 1er janvier de l’année civile de référence. Au cours de cette année, elle a connu 80 départs et 70 embauches.

Le turnover est alors de : ([80 +70]/2)/1000) X100 = 7,5%.

Y a-t-il un bon et un mauvais taux de turnover en entreprise ?

En 2015, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du Ministère du Travail estimait à plus de 16% le turnover en France, pour toute entreprise de 1 salarié ou plus.

De fait, le taux global des entreprises françaises n’a pas grand sens. Selon la taille — une entreprise de 1 salarié qui met la clé sous la porte, c’est un turnover de 50% ! — et les secteurs d’activité — entre des secteurs à faible mobilité et ceux où la mobilité professionnelle est grande comme le commerce ou la restauration par exemple — il peut varier très fortement.

Il y a donc des taux de turnover raisonnables pour chaque activité, qui peuvent grandement différer.

Penser en moyennes globales est donc peu utile ; on peut cependant avancer une fourchette à affiner selon les secteurs. Un consensus des économistes existe autour de grandes valeurs théoriques :

À moins de 5 %, le turnover serait trop faible : pas assez de renouvellement ;

Au-delà de 15%, il serait trop élevé

Le taux idéal serait donc compris entre 5 et 15%.

Quels facteurs déterminent le taux de turnover ?

Avant d’agir sur le turnover de votre entreprise, prenez le temps d’en identifier les causes. Elles seront multiples et vous conduiront à vous doter d’indicateurs spécifiques pour les repérer.

Les 5 causes principales d’un turnover élevé en entreprise

Parmi toutes les raisons internes qui peuvent conduire à un turnover problématique, voici les cinq qui semblent les plus décisives.

1 – Des problèmes de recrutement

Les procédures de recrutement peuvent jouer un rôle prépondérant.

Première hypothèse : vous êtes sur un marché en tension, il vous est difficile de recruter des collaborateurs compétents. Vous êtes obligé d’embaucher des personnes moins qualifiées que votre cible initiale.

Ce contexte est d’autant plus compliqué pour votre entreprise que les salariés en place vont vraisemblablement rencontrer des opportunités d’emplois mieux payés.

Seconde hypothèse : vous constatez qu’une bonne partie de vos récents embauchés restent peu de temps et/ou ne vous donnent pas satisfaction. Votre stratégie de recrutement doit sans doute être repensée.

2 – La question des salaires

Si le salaire est de moins en moins le nerf de la guerre, une politique salariale à bas coût génère souvent un fort turnover.

Si vous préférez embaucher des débutants à salaire relativement faible par rapport au marché, il est naturel que ceux-ci, une fois leur première expérience acquise dans votre entreprise, cherchent des postes mieux rémunérés.

De même si votre stratégie de recrutement est de tirer les salaires vers le bas sans contrepartie particulière, ne vous étonnez pas que vos salariés vous quittent rapidement pour de meilleures opportunités.

3 – Un management défaillant

Le management des équipes est un élément fondamental dans la constitution d’un bon climat de travail, dans l’engagement des salariés et leur motivation.

Un management médiocre peut générer plusieurs problèmes internes : le manque de communication, la prise de décisions qui peuvent sembler arbitraires, l’absence de prise de responsabilité du manager, un management brutal, etc. risquent d’entraîner beaucoup de frustrations, de conflits entre les personnes, une démotivation et un mal-être.

La fuite est souvent la solution qu’adoptent alors les collaborateurs.

4 – Une gestion RH à revoir

Se sentir à l’aise dans son entreprise, mais n’avoir aucune perspective d’avancement peut miner les plus motivés des salariés.

Les meilleurs éléments auront tendance à chercher ailleurs le développement de leur carrière.

5 – La question du bien-être et de la qualité de vie au travail

Le rapport au travail a rapidement évolué ces dernières années. Les notions de bien-être et de qualité de vie au travail ont ainsi pris une importance nouvelle. Les années COVID, en généralisant le télétravail d’une majorité de profession, ont accéléré cette évolution.

Aujourd’hui, l’un des éléments majeurs dans le choix d’un travail est l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, ainsi qu’un climat interne épanouissant et le plus harmonieux possible.

Une société qui favorise à l’inverse un certain mal-être au travail, ou qui n’agit pas pour diminuer le stress ou améliorer les conditions de travail s’expose à une défection importante de ses salariés.

Des outils pour repérer les causes d’un turnover excessif

Afin de comprendre l’état d’esprit de votre personnel et d’anticiper le risque d’une rotation trop importante, il est essentiel de vous doter d’instruments de mesure réguliers.

1 – Réaliser des enquêtes sur la motivation et la satisfaction de vos collaborateurs

Sonder à intervalles réguliers, une fois par an par exemple, l’ensemble des salariés est une excellente opération.

D’une part, vous montrez l’intérêt que vous portez au personnel, sous réserve, bien sûr, que les résultats de cette étude soient suivis de mesures concrètes.

D’autre part, vous recueillez des informations fondamentales pour comprendre les éventuels problèmes auxquels votre entreprise risque d’être confrontée.

L’enquête repose sur un questionnaire dont les réponses sont anonymes. Cela peut amorcer une démarche Qualité de vie au travail. Son questionnaire vous aidera à la fois de manière ponctuelle et pour établir votre démarche QVT.

2 – Utiliser les entretiens annuels

Les entretiens annuels sont l’occasion pour un responsable d’échanger avec chaque membre de son équipe : bilan de performances, fixation d’objectifs, mais également discussion à bâtons rompus.

Si la confiance est réciproque, c’est le moment idéal pour entendre d’éventuelles récriminations et insatisfactions.

3 – L’entretien de départ : une mine d’informations

Si la démission ou la rupture conventionnelle du salarié n’intervient pas sur un mode conflictuel, il convient d’exploiter au mieux l’entretien avec le salarié quittant l’entreprise.

Délié des réserves et méfiances dont il pouvait faire preuve en tant que salarié, il parlera librement des raisons qui l’ont conduit à cette séparation. Il vous donnera des indications sur d’éventuelles actions à mettre en œuvre pour atténuer ou supprimer ces raisons.

En combinant ces trois outils, vous disposerez d’une connaissance approfondie des problèmes rencontrés et des solutions à envisager.

Point important : si un turnover excessif n’est pas une bonne chose pour votre entreprise, trop faible, il est également préoccupant. Les mêmes outils vous donneront également des indications d’actions.

En quoi le turnover en entreprise peut-il être dangereux ?

Lorsque « trop » de salariés démissionnent ou se font licencier, c’est le signe qu’il existe un malaise dans l’entreprise.

L’intérêt de faire baisser le turnover dans ce contexte est au moins quadruple.

1 – Assécher la fuite des talents

De nombreux départs signalent un malaise. Souvent, les premiers à partir, car ils en ont la capacité, sont les meilleurs talents. Problèmes de management, de climat social ou de salaires, ils n’ont pas de difficulté à trouver d’autres postes.

Se priver des meilleurs est rarement positif…

2 – Limiter la désorganisation et la démotivation des équipes

Voir ses collègues quitter l’entreprise n’est pas très motivant ! Surtout si cela se répète.

De plus, chaque départ est un facteur de désorganisation d’un service ou d’une équipe. L’arrivée d’un nouvel embauché, son intégration dans l’équipe, son adaptation à ses missions prennent du temps à tous et se paient en productivité globale.

3 – Diminuer des coûts de recrutement importants

Un départ doit souvent être remplacé. Le coût d’un recrutement n’est pas anodin, d’autant qu’on peut commettre des erreurs. Entre le temps passé par les services RH à chercher les bons candidats, les entretiens, la difficile décision, cela se chiffre en milliers d’euros.

Répétée souvent, l’opération grève substantiellement les comptes de l’entreprise.

4 – Inverser la détérioration de la marque employeur

Une entreprise qui ne sait pas garder ses salariés ne peut cacher longtemps ce qui devient un problème.

Il en va de sa réputation : elle devient moins attractive pour recruter, et moins rassurante pour les clients.

Précision sur le turnover trop faible : s’il indique une satisfaction globale des salariés et une situation stable économiquement, il peut présenter plusieurs risques, dont on citera :

Un manque de dynamisme ;

Un vieillissement de la pyramide des âges : en ne renouvelant pas le personnel, l’entreprise se prive de nouveaux talents, de compétences nouvelles, de personnes motivées ;

Un accroissement de la masse salariale : par le jeu de l’ancienneté, les salaires augmentent, sans être compensés par l’arrivée de jeunes salariés moins bien payés ;

C’est une situation que l’on doit également prendre au sérieux et traiter rapidement.

Comment lutter contre le turnover en entreprise ?

Vous avez un problème de taux de turnover élevé ? Vous avez analysé les rendus de vos outils d’investigation ? Voici les 4 manières de régler le problème.

1 – Changer la grille des rémunérations

Si le problème est principalement financier, il est temps de modifier votre politique salariale. À vous de déterminer les personnes à augmenter en urgence. Attention, ce n’est pas si simple. Vous risquez de créer de la frustration chez des salariés jusqu’alors motivés et qui vont trouver la mesure injuste à leur égard.

Faites preuve de beaucoup de communication et de créativité !

2 – Entamer une démarche de qualité de vie au travail

Aujourd’hui, c’est une revendication primordiale : travailler dans un contexte plus agréable et reverser sa vie personnelle.

Dans tous les cas de figure, elle améliorera sensiblement la motivation des salariés.

La meilleure façon d’y répondre est d’entamer une démarche QVT et de mettre en place de nombreuses actions allant dans ce sens.

Parmi elles, hormis l’organisation du télétravail plusieurs jours par semaine, vous pouvez intégrer dans votre entreprise des ateliers destinés au bien-être de vos collaborateurs. Par exemple :

Les aider à lutter contre le stress qui est un facteur de démotivation radical ;

Proposer des sessions de sensibilisation sur le harcèlement au travail ;

 Organiser des sessions de yoga, de sports ou de méditation ;

Et si vous voulez aller plus loin, pourquoi pas des ateliers de nutrition ou de naturopathie ? Ils sont très suivis et très appréciés des collaborateurs qui y trouvent un bon compromis pour mener de front leurs vies professionnelle et personnelle.

3 – Réaménager la politique RH de votre entreprise

Manque de débouchés, organisation déficiente, insuffisances managériales. Si le nœud du problème vient de la politique des relations humaines dans votre entreprise, n’hésitez pas à la revoir. Voire de la modifier de fond en comble.

C’est un travail assez lourd, mais duquel vous retirerez de nombreux bénéfices. Adoptez une démarche pragmatique pour répondre à chaque point d’achoppement, et mettez en place une nouvelle politique RH plus efficace, mieux comprise et mieux vécue.

4 – Renforcer l’esprit d’équipe

Un moyen de limiter les départs et de diminuer le turnover en entreprise est de souder les équipes existantes. Vous pourrez dans un premier temps atténuer la déstabilisation générée par une démission, puis surtout en empêcher de nouvelles.

L’organisation d’événements fédérateurs, une politique de communication plus inclusive, des sessions de team building ou encore des repas d’entreprise vous aideront à redonner de la cohésion et de la motivation à votre personnel.