Quiet Quitting : Définition en enjeux de la démission silencieuse

Le quiet quitting, que l’on traduit en français par la démission silencieuse, est un phénomène dont on a commencé à parler, au lendemain de la pandémie, sur les réseaux sociaux. Mais s’agit-il uniquement d’un buzzword, ou d’un phénomène bien réel, qui touche les entreprises. 

Dans cet article, on va s’intéresser à cette forme de désengagement au travail, qui consiste principalement à ne plus faire que le strict minimum. Quels sont les signes du quiet quitting, quels sont les risques auxquels s’exposent les salariés qui choisissent cette voie ? Mais surtout comment prévenir cette dynamique au sein de ses équipes et réengager les collaborateurs en améliorant la qualité de vie au travail ?

Quiet-Quitting

Quiet Quitting: De quoi parle-t-on ?

Le quiet quitting se caractérise par le fait de ne plus produire que le minimum d’effort nécessaire pour conserver son emploi. Les employés qui font, consciemment ou non, le choix de la démission silencieuse, ne consacrent donc plus de temps ni d’énergie supplémentaire à leurs missions. 

 

Popularisé sur les réseaux sociaux, et notamment sur TikTok à partir de 2022, la démission silencieuse est une forme de rébellion contre la “hustle culture” (soit le fait de donner son maximum pour une entreprise et faire preuve de zèle pour évoluer en son sein et participer à son développement). 

 

Le terme a en partie été inspiré par un hashtag créé en Chine, #TangPing, que l’on peut traduire par « rester à plat”. Là encore, il s’agissait d’un moyen de protester contre le surmenage au travail, un phénomène très important dans le monde du travail chinois. 

 

Plus globalement, le quiet quitting montre une évolution dans la façon dont les nouvelles générations perçoivent le travail.  Mais aussi une forme de déception et la perte de la croyance selon laquelle plus on se démène pour son entreprise, plus celle-ci nous récompensera. 

Le quiet quitting : un phénomène réel en France ?

Beaucoup de personnes se questionnent encore sur les fondements du quiet quitting en France. Cela est dû en partie au fait que le phénomène a commencé à émerger aux Etats-Unis. Mais plus globalement, la démission silencieuse est difficile à observer et il est donc complexe d’évaluer son ampleur réelle.  

 

Une première solution pour mieux cerner les contours du quiet quitting en France est de le considérer comme une forme de désengagement au travail. Or d’après les sondages menés à ce sujet par Gallup, on constate que la main-d’œuvre mondiale est effectivement moins engagée qu’elle ne l’était par le passé. Selon le rapport Gallup State of the Global Workforce 2022, seulement 21 % des travailleurs sont engagés au travail, et 19 % sont activement désengagés.

 

Au total, c’est donc 60 % de la population active mondiale qui pourrait potentiellement « démissionner silencieusement”. Pour revenir à la France, un récent sondage menée par l’IFOP indique que 37 % des Français seraient concernés par le quiet quitting, refusant les heures supplémentaires ou d’être sollicités en dehors de leurs heures de travail. 

 

Une note de la fondation Jean-Jaurès observe également  que le travail occupe une place de moins en moins structurante dans nos vies, C’est particulièrement vrai pour la nouvelle génération qui à 45 % ne se rend au travail que pour l’argent qu’elle en retire. En 1993, cette proportion était de 33 %. Le travail est ainsi davantage perçu aujourd’hui comme une contrainte (54 %) que comme une source d’épanouissement (46 %)

Les risques du Quiet Quitting pour le salarié

La réponse à la question : quels sont les risques que je cours avec le quiet quitting est simple : aucun. En effet, le salarié qui opte pour la démission silencieuse continue de réaliser l’ensemble de ses tâches. Cette attitude ne peut donc pas constituer une faute grave ni un motif de licenciement. L’employeur qui souhaiterait renvoyer un salarié pour cette raison risque lui une action en justice pour licenciement abusif. 

 

Dans une certaine mesure, on peut même considérer que la démission silencieuse présente des avantages pour les employés (et donc par effet de ricochet pour l’entreprise). Le quiet quitting encourage en effet un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et personnelle. Les salariés arrivent en effet à se déconnecter du travail et à profiter plus pleinement de leur temps libre. 

 

Ils se concentrent de plus sur les tâches essentielles et ne ressentent pas le besoin d’en faire plus ou de rester plus longtemps au bureau pour impressionner leurs managers. De fait, ils courent des risques moindres de souffrir de stress au travail ou d’épuisement professionnel (burn out). Pour l’entreprise, c’est l’assurance d’avoir des employés en meilleure santé (aussi bien mentale que physique), qui ne sont pas dépassés par leur charge de travail. 

 

Attention néanmoins à prendre en compte les risques (non légaux) qui peuvent accompagner le quiet quitting en entreprise. Dans un environnement professionnel particulièrement compétitif, cette attitude peut en effet entraver les opportunités d’évolution. Les managers ou supérieurs peuvent en effet considérer la démission silencieuse (avérée ou non), comme un manque de volonté de relever de nouveaux défis ou de participer activement à la croissance de l’entreprise. 

 

Le principal effet secondaire du quiet quitting sera donc de se retrouver coincé au même poste pendant une période prolongée, sans possibilité de progresser personnellement ni d’évoluer au sein de l’entreprise. 

Quelles sont les causes de la démission silencieuse ?

Malgré sa hausse de popularité sur les réseaux sociaux depuis quelques années, le quiet quitting n’a rien d’un phénomène nouveau. Le désengagement au travail est en effet un réflexe naturel qui peut être provoqué par un salaire médiocre, une charge de travail excessive, un épuisement professionnel ou l’absence d’opportunité d’évolution. 

 

Le burn out (ou syndrome d’épuisement professionnel) est d’ailleurs l’une des premières causes de démission silencieuse. Selon le rapport Anatomy of Work 2022 d’Asana, 7 employés sur 10 en ont souffert au cours de cette année. L’épuisement professionnel augmente les risques de désengagement, en grande partie parce que les personnes touchées ont moins d’énergie physique et mentale à dédier à leur travail. 

 

La pandémie a également profondément bouleversé notre rapport au travail. Nous avons eu plus de temps pour analyser et remettre en question nos choix professionnels, mais aussi pour évaluer l’ampleur du déséquilibre entre notre vie professionnelle et privée. Les réseaux sociaux offrent également une caisse de résonance aux mécontents, ce qui amplifie automatiquement la visibilité du phénomène de quiet quitting. 

 

La hausse du travail à domicile crée également une certaine forme de déconnexion entre les salariés et l’entreprise. Les échanges se limitent à l’essentiel, ce qui peut encourager les travailleurs à ne faire que le strict minimum. La distance complique également le partage de feedback et d’une réelle reconnaissance du travail accompli. Se sentant moins valorisés, les employés peuvent être moins motivés à donner le meilleur d’eux-mêmes. 

 

Pour résumer, la démission passive peut avoir plusieurs causes

 

  • Une souffrance liée au fait de ne pas se sentir reconnu à sa juste valeur ou des difficultés à trouver sa place dans le monde de l’entreprise ;
  • La conviction que le travail n’est pas la principale source de notre épanouissement personnel ; 
  • La volonté de faire changer le monde de l’entreprise et de ne pas placer des attentes trop élevées sur les salariés ;
  • La sensation d’épuisement professionnel et la conviction que ce sur-engagement n’est pas bénéfique pour le travailleur (et dans une moindre mesure pour l’entreprise).

5 signes du Quiet Quitting

Lorsqu’un employé s’engage dans un processus de démission passive, il cesse d’aller au-delà des attentes de son employeur et “se contente” de faire le strict minimum possible pour éviter d’être licencié.

 

En pratique, cela peut signifier de : 

 

  • Ne pas se porter volontaire pour des tâches supplémentaires, des rôles ou des responsabilités plus élevées ; 
  • Ne pas s’exprimer durant les réunions à moins que l’on nous adresse expressément la parole ; 
  • Ne plus répondre aux messages en dehors des horaires de travail ;
  • Refuser une tâche car elle n’est pas inscrite dans la description de son poste ;
  • Ne plus participer aux évènements sociaux. 

Comment détecter le quiet quitting au sein de son entreprise ?

Comme on peut le voir, le quiet quitting est un phénomène subtil et presque invisible. Il sera donc compliqué pour les managers de le détecter dans leur environnement de travail. Il existe néanmoins des outils qui peuvent leur mettre la puce à l’oreille : 

  • Des enquêtes sur l’engagement des employés. Le fait d’envoyer régulièrement un sondage (sous la forme d’un NPS – ou Net Promoter Score – par exemple) peut être un bon moyen de détecter une tendance de désengagement généralisé. Le simple fait que certains employés ne participent pas à l’enquête peut déjà être le signe qu’ils sont engagés dans un processus de démission silencieuse. 
  • Les KPI de productivité. Le quiet quitting se traduit naturellement par une baisse de la productivité (même si elle sera beaucoup plus subtile que dans un cas de burn out ou de brown out, par exemple). 
  • Le turn over et le CA de l’entreprise. Dans les cas les plus extrêmes, le quiet quitting peut donner lieu à une démission ou une chute de la productivité telle qu’elle impactera les revenus de l’entreprise ;
  • La mobilité interne. Les personnes qui opèrent une démission silencieuse ne seront généralement pas sélectionnées pour des promotions ou des postes de leadership. Le simple fait de suivre les profils qui sont promus (et ceux qui stagnent) peut aider à repérer les employés qui sont dans une situation de quiet quitting. 

Comment éviter le Quiet Quitting ?

Bien que la démission passive soit une tendance qui puisse inquiéter les managers,  il est possible de l’atténuer et de réengager ses employés via des mesures très simples. Voici quelques leviers à mobiliser pour éviter le quiet quitting au sein de ses équipes. 

1. Former et engager ses managers

La première étape est de donner des outils et ressources à ses managers pour réussir à mieux identifier les cas de quiet quitting. Mais aussi des stratégies pour réduire le stress et les risques d’épuisement professionnels chez les employés. 


Gardez également à l’esprit que le désengagement touche également le management (un sur 3 selon Gallup). Il est donc essentiel de travailler à l’engagement de ses managers pour éviter que la démission silencieuse ne se propage dans leurs équipes.

2. Donner du sens au travail

L’engagement au travail passe de plus en plus par la sensation d’accomplir des tâches qui ont un réel sens et un impact positif sur l’entreprise en particulier, et la société en général. L’un des moyens les plus efficaces d’éviter le quiet quitting est donc de mobiliser ses équipes dans des initiatives de RSE ou des challenges solidaires, alignés avec leurs valeurs. 

 

Ces initiatives auront pour effet de rendre l’environnement de travail plus épanouissant, et de remotiver ses équipes. Elles seront ainsi plus engagées au sein de l’entreprise et encouragées à donner le meilleur d’elles-mêmes. 

 

Le simple fait d’impliquer ses employés dans la prise de décision est aussi un bon moyen de recréer de l’engagement. Partager les objectifs de l’entreprise, créer un leadership horizontal, dans lequel chacun peut partager ses idées permet de recréer une connexion entre le travail des salariés et le développement de l’organisation. 

3. Donner des feedbacks et récompenser l’effort des salariés

Pour finir, un bon moyen de prévenir la démission passive de ses employés est de leur offrir plus de reconnaissance pour le travail accompli. Cela suppose de mettre en place une culture du feedback, de récompenser les accomplissements de ses équipes et de valoriser leur participation à la croissance de l’entreprise. 

 

Selon Deloitte, un programme de récompense des salariés contribue à augmenter leur productivité et leur performance de 14 %. Cela peut passer par de simples retours positifs des managers et dirigeants de l’organisation, mais aussi par des avantages concrets (congés supplémentaires, parts de l’entreprise, pourcentage des bénéfices, etc.)



Le quiet quitting est un phénomène réel en France, qui se traduit par un désengagement des employés. Pour remotiver ses équipes, il est donc crucial de comprendre quelles sont les causes de cette démission silencieuse et de créer une culture interne qui favorise la reconnaissance et la récompense du travail accompli par ses collaborateurs.