L’importance d’un accord QVT en entreprise et les modalités de sa mise en place

La notion de qualité de vie au travail a progressivement gagné de la crédibilité en entreprise. Au point que la législation et la réglementation imposent aujourd’hui un certain nombre de mesures, et que de nombreuses sociétés mettent en œuvre des plans d’action. La signature d’un accord QVT est un puissant moteur pour que la greffe d’une telle démarche soit pleinement réussie et pérennisée.

La qualité de vie au travail, qu’est-ce que c’est ?

Le concept de QVT regroupe les actions permettant de concilier l’amélioration des conditions de travail pour les salariés et la performance globale des entreprises. Il repose sur l’idée d’une stratégie gagnant – gagnant : les employés qui travaillent dans un environnement agréable sont plus motivés et efficaces, l’entreprise y gagne en termes de productivité et de résultats.

Les fondamentaux de la QVT

Lorsqu’une entreprise met en œuvre une démarche QVT, six thématiques sont impactées :

  • Le climat social,
  • Le contenu du travail,
  • La santé au travail,
  • Les parcours professionnels, les carrières,
  • L’engagement et le management
  • L’égalité professionnelle.

Les enjeux et l’importance de la QVT dans une entreprise

L’importance de ces axes dans la vie des salariés comme dans la santé de l’entreprise est évidente. Garantir le bien-être de ses collaborateurs, veiller à ce qu’ils s’épanouissent dans leurs fonctions, faciliter la transition entre vie professionnelle et vie privée, promouvoir une politique salariale juste et équitable, etc. Autant d’engagements qui favorisent l’attachement à sa société, permettent de conserver les talents et contribuent à son développement.

La qualité de vie au travail est devenue encore plus sensible depuis l’épidémie de COVID et le bouleversement consécutif dans notre rapport au travail. D’où l’urgence pour les entreprises à l’utiliser comme un levier pour redéfinir la notion même du « travailler ensemble ».

Les obligations de l’employeur impliquent-elles un accord QVT obligatoire ?

Depuis les années 2000, le Code du travail a introduit un certain nombre d’obligations auxquelles l’entreprise doit répondre en matière de qualité de vie sur le lieu de travail.

Les impératifs en matière de QVT

C’est sur deux aspects de la qualité de vie que le Code du travail est venu rappeler le devoir de vigilance et d’action de l’employeur.

La mise en place de mesures destinées à éviter ou traiter les risques psychosociaux repose sur l’obligation de veiller à la sécurité des employés. L’employeur doit prendre tous les moyens nécessaires à la préservation de leur santé et de leur sécurité physique et psychique.

L’autre cheval de bataille vient des accords nationaux interprofessionnels et de l’accord de 2013 portant sur la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle.

Toute entreprise a ainsi désormais l’obligation de viser les objectifs suivants :

  • Atteindre l’égalité professionnelle entre femmes et hommes,
  • Favoriser la conciliation entre vie personnelle et professionnelle,
  • Réaliser un diagnostic préalable en vue de mettre en œuvre une démarche QVT et de définir des indicateurs concrets,
  • Inclure les partenaires sociaux.

Pas d’obligation d’un accord QVT, mais un devoir de négociation

Il faut distinguer deux cas :

  • Les entreprises où existe une section syndicale ou un délégué syndical. Elles font l’objet de négociations obligatoires.
  • Celles où il n’y a pas de délégué syndical, et dans lesquelles de telles négociations ne sont pas envisagées.

Plaçons-nous dans le cas d’une entreprise où un délégué syndical a été désigné. Le Code du travail prévoit l’engagement régulier de négociations obligatoires.

Celles-ci portent sur une large palette de thèmes :

  • Les rémunérations et les salaires effectifs,
  • Le temps de travail,
  • Le partage de la valeur ajoutée,
  • L’égalité professionnelle entre femmes et hommes,
  • La qualité de vie et des conditions de travail.

Si aucun accord portant sur la fréquence de ces négociations n’a été établi, celles-ci doivent se tenir annuellement.

7 thèmes sur lesquels doivent porter les négociations:

En matière de qualité de vie au travail, la loi liste sept thèmes sur lesquels doivent porter les négociations :

  • L’articulation entre vie personnelle et vie professionnelle pour les salariés,
  • Les mesures permettant d’atteindre l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes,
  • Les mesures permettant de lutter contre toute discrimination,
  • Les mesures en matière d’insertion professionnelle et de maintien des travailleurs handicapés dans l’emploi,
  • Les modalités de définition d’un régime de prévoyance,
  • L’exercice du droit d’expression directe et collective des salariés,
  • Les modalités d’exercice du droit à la déconnexion,
  • Les mesures visant à améliorer la mobilité des salariés entre domicile et lieu de travail (uniquement dans les entreprises de plus de 50 salariés où existe un délégué syndical).

En résumé, à une fréquence régulière, entre annuellement et tous les 4 ans, la question d’un accord sur la qualité de vie au travail est au centre de négociations entre direction et délégué syndical.

La signature d’un accord QVT de la part de l’employeur n’est pas obligatoire.

Dans ce cas, à l’issue des négociations, un procès-verbal de désaccord est établi, consignant les propositions de chaque partie et les mesures unilatérales que l’employeur s’engage à mettre en œuvre.

La mise en place de la négociation sur la QVT

Il n’est pas difficile d’en convenir : une négociation débouchant sur un accord vaut souvent mieux que l’absence d’accord. Le climat social dans l’entreprise risque en effet de pâtir d’un tel constat d’échec, et ce au détriment à la fois des employés et de l’entreprise.

Les conditions de réussite dans la négociation d’un accord QVT

Tous les spécialistes du droit du travail comme du monde de l’entreprise estiment qu’un bon accord se prépare bien en amont. C’est avant le début des négociations que tout commence !

Un diagnostic partagé

Définir les bases d’un accord suppose que l’on sache déjà quels sont les problèmes à traiter. L’entreprise pourrait ainsi lancer une phase diagnostique, reposant sur des questionnaires sur la qualité de vie au travail et le ressenti du personnel.

Les résultats de l’étude interne doivent être partagés et discutés avec l’ensemble des salariés : réactions et suggestions seront échangées en toute transparence puis consignées dans un document accessible à tous.

Cet état des lieux permettra aux représentants du personnel de proposer des actions QVT concrètes reposant sur le diagnostic et ne mettant pas en péril la performance économique de l’entreprise.

Une journée peut être consacrée aux présentations et échanges, afin de motiver l’ensemble des salariés à s’engager dans la démarche.

La formation des représentants du personnel

Savoir négocier n’est pas inné. Les questions à traiter sont souvent complexes, techniques et requièrent des compétences spécifiques. Lorsque les parties sont au même niveau de connaissances et d’expertise, les échanges peuvent se porter sur les points concrets, sans arrière-pensées. Pas de jeu de domination, et la capacité pour l’ensemble des partenaires de confronter les points de vue, d’avancer des arguments rationnels et documentés.

Contrairement à ce que pensent certains responsables des ressources humaines, à terme, l’entreprise n’a rien à gagner à des échanges inégalitaires, d’où elle sort facilement victorieuse. Agir ainsi, c’est passer d’un univers responsable où l’on peut tout aborder et résoudre, à une ambiance générant une frustration qui va tendre inéluctablement le climat social. La formation des représentants du personnel est un atout pour trouver un bon accord.

La participation de toutes les parties prenantes

Parvenir à un accord sur la QVT concerne tout le personnel, sans distinction : salariés, managers, représentants du personnel. Au-delà du diagnostic, un dialogue constant doit être entretenu avant et pendant les négociations entre l’ensemble des salariés et les membres de la direction.

Le délégué syndical comme les représentants du personnel ne doivent pas préempter les souhaits et attentes des employés. Tout doit se faire carte sur table, aussi bien au niveau de la direction que du personnel.

Les 4 étapes pour aboutir à un accord QVT

Pour aboutir à un accord pertinent, utile et partagé, suivez une feuille de route en 4 phases.

1 – Établir un diagnostic

Cet élément qui contribue à la réussite de l’accord a été largement abordé plus haut. Insistons sur l’aspect participatif et partagé de ce diagnostic, véritable base de la construction de la démarche et de l’accord sur la qualité de vie au travail.

2 – Élaborer un plan d’action

Une fois les objectifs déterminés à la suite du diagnostic partagé, il faut les prioriser et mettre des mesures face à chaque objectif prioritaire.

L’ensemble des parties prenantes doit être consulté régulièrement au cours de cette phase cruciale et pouvoir donner un avis non décisionnaire.

In fine, un plan d’action pluriannuel est défini, détaillant chaque action à entreprendre ainsi que les moyens à leur allouer.

3 – Définir des indicateurs de suivi des mesures

L’accord porte sur une démarche et non sur la mise en place statique de quelques mesures. Il est indispensable de disposer d’outils permettant un suivi efficace des actions menées.

4 – Le suivi et l’évaluation des actions mises en œuvre

Chaque année, un bilan des actions entreprises est établi, fondé sur l’analyse des indicateurs QVT et les remontées du personnel. L’accord doit prévoir une souplesse dans l’application des mesures, et la possibilité d’en modifier, d’en supprimer et d’en introduire de nouvelles selon les résultats des bilans de suivi.

L’accord n’étant signé que pour une durée limitée, si celle-ci est relativement courte, le suivi peut directement être utilisé pour préparer le nouvel accord.

Le contenu d’un accord QVT

Qu’y a-t-il exactement dans un accord QVT ? On peut constater qu’il s’agit dans chaque entreprise d’inventer sa propre définition de la qualité de vie au travail, en adéquation avec sa spécificité et sa culture.

Les grandes lignes d’un accord QVT

À partir de l’étude de nombreux accords QVT, on peut synthétiser les grandes thématiques partagées par les entreprises, et celles qui semblent moins au cœur des préoccupations d’une partie des sociétés.

5 engagements très présents dans une majorité d’accords QVT

  1. L’organisation du travail, le thème le plus populaire. C’est en lien direct avec la crise du COVID, le télétravail contraint, et les questions qui ont surgi sur ce sujet. Ainsi la question du télétravail est-elle très souvent abordée.
  2. Le sens et le contenu du travail. Charge du travail trop importante, missions répétitives, autonomie, clarté des consignes… Tous ces points y sont traités avec plus ou moins de détails.
  3. La conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle.
  4. Prévention et sensibilisation aux risques psychosociaux : des actions de sensibilisation contre le harcèlement ou pour limiter le stress sont fréquemment mises en place.
  5. La gestion des relations au travail. La plupart des accords QVT prévoient des temps d’échange entre salariés, ainsi qu’une procédure de médiation en cas de conflit par exemple.

3 sujets qui montent dans les accords QVT

  1. L’environnement de travail, qui concerne les conditions à la fois matérielles et humaines. Les questions d’ergonomie ou le problème des espaces de travail, encore minoritaires aujourd’hui, semblent devenir de véritables enjeux.
  2. L’égalité homme femme, malgré sa criante et persistante injustice et les discours qui l’accompagnent, figure plutôt en queue de peloton.
  3. Le développement personnel est aussi encore souvent oublié, mais au vu des nouveaux rapports au travail, tout indique qu’il va rapidement être un invité permanent des accords QVT. La pratique de sport en entreprise , des ateliers de sophrologie pour apaiser le stress ou des séances de massage améliorent sensiblement le bien-être des salariés.

Quelques exemples d’accord qualité de vie au travail

De nombreuses entreprises ont déjà signé des accords QVT. Parmi celles-ci on peut citer Doctolib dont le souci est le bien-être à la fois personnel et professionnel de ses salariés. Chaque salarié bénéficie d’un plan de carrière individualisé incluant des objectifs de développement personnel.

L’Oréal met l’accent dans son accord sur l’équilibre vie personnelle/vie professionnelle, en installant par exemple une bourse de don des jours de congés aux salariés qui en ont besoin pour une maladie, la garde d’enfant…

Chez Air France, l’accord insiste sur le traitement des incivilités de la part des clients et met en place plusieurs mesures visant à les prévenir et à accompagner le personnel en ayant été victime.

Enfin, chez Biomérieux, l’accord organise le flexjob, soit le télétravail individualisé. Il prévoit également un accompagnement vers la retraite, des aides ciblées pour les aidants ou encore la mise en place d’espaces de relaxation.

Le rapport au travail a beaucoup évolué ; les accords QVT sont un moyen efficace et rentable d’accompagner cette évolution au grand profit de tous.